Can't hold on or life won't change | ft. Haeden

Pas deux fois.
Zakarias refusait de s’ennuyer une fois de plus en cours de … Diplomatie ? Il avait tellement peu l’habitude de suivre dans ce fichu cours, qu’il ne savait même pas comment le nommer. Il avait profité de la cohue des couloirs pour s’écarter du groupe et se faufiler. Un vulgaire de toilette, alors qu’il s’y était caché et qu’il tendait l’oreille pour jauger quand il pourrait ressortir sans risque de se faire attraper par le professeur. Durant ses minutes en “planque”, il avait sorti son téléphone et envoyé un message à Haedan :

“ T’es en cours ? J’vais faire un tour en ville, si ça t’dit, t’as qu’à me rejoindre au Blue Wave. :p ”

Il ne se serait pas permis de poser la question à ses autres contacts de l’académie, car il les savait trop sage pour se permettre une telle escapade au beau milieu de la matinée.

Il faut dire que le destin s’amusait très souvent à rassembler ces deux zigotos.
Au début, ils accusaient le hasard. Les deux premières fois en tout cas, parce qu’au bout de la dixième, ils conçoivent que le destin peut être facétieux, il y a anguille sous roche à un moment donné. Surtout quand il est interrompu en train de trafiquer avec des gens de son âge dans une ruelle à l’abri des regards et échanger quelques billets contre un petit sachet. Zakarias ne paye pas de mine ainsi, mais trop bon trop con, il entre parfois dans de sales combines pour rendre service à un ami ou pour lui-même, parce qu’il ne peut envoyer personne à sa place. Tous ses amis ne sont pas innocents. Son père jugerait même certains d’entre eux comme “de mauvaises fréquentations”.

On s’égare, on s’égare.
Revenons à nos moutons.

L’apprenti-écuyer s’était sauvé une fois qu’il avait jaugé juste et il n’avait pas trainé à se rendre en ville. Zakarias s’était empressé de retirer au moins les signes distinctifs de son appartenance à l’académie et il semblait savoir où aller. Il était passé devant quelques connaissances, dont ses anciens patrons, qu’il avait salué, puis il était entré dans un établissement pour le moins classique. Le Blue Wave donc. Un bar qui, passé 21h, devenait une discothèque. Pour le moment c’était relativement calme à l’intérieur. Il n’était que 11h après tout.

Il s’était assis au comptoir et avait demandé un simple café. Nous le rappelons ; trop tôt pour le Blue Lagon. D’autant qu’il a besoin d’un bon coup de fouet pour se réveiller. Il avait le nez sur son téléphone et il était en train de scroller pour voir s’il y avait des choses intéressantes à faire en ville.

Sans succès, mais l’idée de camper dans une salle d’arcade se faisait de plus en plus forte. Il n’a toujours pas battu le record de Shooting Racer et ça l’enquiquine. Il le sent. S’il n’y arrive pas, il ne va pas réussir à trouver le sommeil ! Ce qui est incroyable, lorsque l’on connait son “petit souci”. « T’attends quelqu’un ? » lui demande le gérant, alors que Zakarias hausse les épaules : « Oui et non. Ça va dépendre du quelqu’un en question. Si c’est un vrai, il va v’nir. Je le vois mal rester sagement en cours. Sauf s’il s’est fait casser la gueule en chemin. Ce que je n’espère pas pour lui, bien sûr ! »

L’attente n’avait pas duré longtemps. Pas à son gout du moins.
Il avait tout de même eu le temps de prendre trois cafés et de discuter avec le type qui tient l’établissement. Discuter était d’ailleurs un bien grand mot, puisque la conversation avait principalement tourné autour de lui et Zakarias ne s’était pas gêné pour étaler sa vie. Une vraie pipelette, mais qui amusait le barman et permettait de rendre la corvée de la vaisselle moins morne.

- “ Yo. ”

L’allocution lui fait relever la tête. Il a un grand sourire ravi, un peu con-con soit dit au passage et il se permet même de glisser une remarque. « Je l’avais dit... » Le tenancier hoche négativement la tête. Par dépit amusé. Pas par refus. Sans plus attendre, il demande ce qu’il doit servir à la petite racaille qui vient d’entrer. « Ramène tes fesses là-dessus. J’étais en train de chercher comment on pouvait s’occuper. J’ai deux-trois idées et t’es pas le seul à qui j’ai demandé de venir. On attend encore un peu. » Pour appuyer ses propos, il tapote le tabouret à côté de lui au comptoir, là où le barman l’attend également pour prendre sa commande.

Zakarias avait donc harponné d’autres personnes ?
Il n’y avait plus qu’à espérer que ça ne soit pas des gens avec qui Haedan s’est fritté.

« J’irais bien à la salle d’arcade, mais tout seul c’est nul. Ça manque de compétition et ça me donne clairement pas envie d’y aller. Eh puis, ça peut être un bon entrainement aussi. Même si je préfère les épées aux flingues. Butter du démon façon Men In Black, très peu pour moi. » Zakarias se décide enfin à arrêter de regarder son téléphone et reporte son attention sur Haedan, qui a été servi entre temps. Bien sûr, le gérant s’attendait à ce que ces sales gosses ne le payent pas. Ce n’était pas la première fois que le noiraud invitait du monde chez lui, mais qu’il ne payait pas leur consommation. Il n’avait pas de grief à son encontre, car ils avaient trouvé un arrangement pour effacer son ardoise. Une fois par semaine, Zak’ était tenu de venir travailler pour faire la plonge ou le service.

« Alors, t’as faussé compagnie à qui cette fois-ci ? Dès qu’on m’a dit que j’allais en cours de diplomatie pour enquiller deux heures, j’ai pris mes jambes à mon cou. C’est pas glorieux, mais j’ai jamais compris l’intérêt de c’cours. » Sa bête noire. Son pire ennemi. Son boss final.
Il regrettera probablement cette aversion un jour et il se sentira bête. Un jour. Peut-être. Ce n’est pas aujourd’hui en tout cas, puisque ça ne semble pas l’inquiéter. Il ne semble même pas y penser d’ailleurs.